Le chêne d’Allouville est un arbre très surprenant puisqu’il abrite dans son tronc deux minuscules chapelles. Il se trouve devant l’église d'Allouville-Bellefosse en Seine-Martime. 

Il  serait le chêne le plus ancien de France et aurait connu l'époque de Charlemagne et croisé Guillaume le Conquérant.

C’est une des curiosités de Normandie. Il doit celà à son exceptionnelle longévité ainsi qu’à la vénération dont il a fait l’objet depuis le Moyen-âge.

Son âge

Son âge exact n'est pas connu. Au XIXe siècle, il a été estimé  à 800 ans, une estimation ultérieure lui en attribue 1 200.

On retrouve des textes à son sujet datant de 1696.

Ses mensurations

Hauteur : 18 m - Circonférence : 15 m  à 1 m du sol

Sa hauteur, est relativement faible. comparativement à sa grosseur car il a été réduit de moitié  par la foudre en 1912.  Son tronc, totalement creux, est de forme conique.

Malgré son grand âge, il produit toujours des feuilles et des glands. 

Son histoire

Selon la légende, il aurait été planté lors la naissance de la Normandie en 911(année du traité de Saint-Clair sur Epte). Les scientifiques avancent qu’il serait daté du IXe siècle. Il serait donc contemporain de Charlemagne.

La tradition veut que les troupes de Guillaume le Conquérant aurait fait halte sous sa frondaison. en allant conquérir l’Angleterre.

L’arbre s’est fissuré avec le temps.

Selon la légende, c’est intrigué par cet espace que le père Du Cerceau aurait pris l’initiative à la fin du XVIIème siècle de dénombrer les enfants pouvant pénétrer à l’intérieur. Mobilisant les écoliers du village, il en fut compté 40. Cet évènement aurait été le déclencheur en 1696 de la décision de l’abbé du Détroit de faire aménager une petite chapelle dédiée à Notre-Dame de la Paix ; laquelle chapelle se trouva doublée d’une chambre d’ermite installée dans une cavité supérieure du TRONC.

Création de la chapelle de la Vierge et de la cellule hermitale par l’abbé Delalande

  La chapelle

D’après des écrits de 1696, l’abbé Delalande, curé de la paroisse, recouvre toutes les crevasses avec des essentes (bouts de planche mince servant à faire une couverture de toit) et construit un petit clocher surmonté d’une croix. Celui-ci n’existe plus mais on peut le voir sur une gravure d’Eustache Hyacinthe Langlois).

L'oratoire  long de 1,75 m, large de 1,17 m, mesure 2,28 m de hauteur  a été aménagé au début du XIXe siècle, parqueté comme un salon et dispose d’ un autel de bois éclairé par deux chandeliers et une lampe suspendue au plancher. Des images de sainte Marie, de saint Joseph et de saint François-Régis sont sur les murs. Une porte grillagée empêche l'entrée au sanctuaire mais permet de voir l’intérieur.

Il glisse également  une image de la vierge dans la fissure qui faisait à l’époque 22 cm et  dédie l’arbre à Notre Dame de la Paix.

   La cellule ermitale

En 1710 le père du Cerceau écrit une ode dans laquelle : «il se souvient qu'il aurait pu être ermite et se voyait apporter chapon et champagne par les braves paroissiens.»  

Un récit oral, consigné dans un recueil en 1914 par l’Abbé Fontaine  raconte que le chêne, aurait été la cible d’une foule révolutionnaire, en 1793. qui voulait incendier ce symbole de clergé. La maitre d’école Mr Bonheure, a remplacé le panneau Notre Dame de la Paix  par  «Temple de la Raison». Le chêne fut sauvé.

Les restaurations au fil du temps

Cinq décennies plus tard, une statue de la Vierge a été offerte au chêne par L’impératrice Eugénie épouse de Napoléon III.

Mais la chapelle, la chambre dessus et l’escalier continuent de subir les affres du temps. En 1853, L’abbé Cholet demande au préfet (Seine Inférieure à l’époque) lors de sa visite de classer le chêne aux Monuments Historiques et de le restaurer.

La restauration fut faite dans le style du XVIIe siècle grâce à un don de 1 200 F du baron Leroy. L’Evêque de Rouen bénit l’autel neuf en octobre 1854.

Au XIX siècle, les villageois tapissent l’intérieur des chapelles de lambris,  recouvrent sont tronc de tavaillons et aménagent un escalier avec balustrade..

Le chêne devient une attraction touristique.

En 1912, la foudre l’ampute de moitié.

Dans les années 1970, lorsqu’il  faillit tomber après une tempête  Robert Bourdu professeur  à la faculté des Sciences d'Orsay et fondateur de l'association A.R.B.R.E.S (arbres remarquables, bilan, recherche, étude et sauvegarde), ayant eu un coup de cœur pour ce chêne millénaire présentant des signes de faiblesse, lança le signal d’alarme.

Dans les années 1988-1993, il organise un groupe de travail (commission d’élus, de professionnels et d’habitants) pour préserver ce chêne et réaliser  les travaux de protection , d'entretien et de soutènement de l'arbre alors bien malade.

Robert Bourdu apportera des solutions innovantes comme :

  • Des petits palets réalisés par le menuisier local et cloués sur le tronc afin d’éviter les infiltrations de la pluie
  • une structure en inox dont les cerceaux soutiennent les branches grâce à un jeu de filin qui rend le tout mobile pour le soutenir et l’empêcher  de tomber..

Mais Le tourisme suscité par cette curiosité procure au chêne-chapelle des dégradations et, en 2007 et 2008, d’autres travaux furent nécessaires : reprise de l’escalier, réaménagement des abords pour éviter le piétinements, création d’un espace pour les touristes.

Reconnaissances

Ce chêne-chapelle a reçu plusieurs distinctions :

  • classé Monument pittoresque en 1932
  • classé Arbre remarquable en 2001
  • inscrit à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel en France depuis 2009
  • prix d'honneur Robert Bourdu de l'Arbre de l'année 2021 
  • prix d’honneur du 10e concours de l'’arbre de l’année 2022 organisé par l’ONF et le magazine Terre sauvage.

 

Références au chêne

Le chêne est au centre de la comédie réalisée par Serge Pénard en 1981 Le Chêne d'Allouville (connu également sous le titre Ils sont fous ces Normands avec Jean Lefebvre, Bernard Menez et Henri Guybet. Il raconte les efforts des villageois pour sauver leur arbre, menacé par un projet d'élargissement de route.

 gravure